À l'heure où la France débat sur le “désengagement” au travail des salariés et sur l'exode vers une autre vie, quelle est la place du bureau ? Quel est l'impact des évolutions du rapport au travail sur les stratégies immobilières des entreprises ? Si nos géographies de travail sont différentes, par quels nouveaux moyens pouvons-nous expérimenter une appartenance à une collectivité ? Quel rôle l’immobilier peut-il et doit-il jouer ?
Animé par ces questions, The Boson Project s'est associé à La Française Real Estate Managers, et avec le soutien de l'Association des Directeurs Immobiliers (ADI) et de Républik Workplace, pour donner la parole à 86 grands décideurs de l’immobilier, de l’environnement de travail ainsi qu’à des chargés de projets workplace et expérience : l’Assurance Retraite, Doctolib, SNCF Immobilier, Nexity, MAIF, Sanofi, Mazars.... ont accepté de partager leurs questionnements et bonnes pratiques sur ce sujet.
1er défi pour les décideurs immobiliers : réinventer l’espace de travail
3. Faire de l’immobilier dans un monde mobile
L’instabilité et l’accélération des évolutions en matière de modes de travail bouscule l’immobilier, qui par essence implique de figer dans le marbre certains choix. Dans un contexte nuisible à la prise de décision, les décideurs immobiliers font plus que jamais face à une sorte de décalage entre les besoins des équipes et l’existant.
Pour avancer dans une période d'instabilité, ils adoptent la stratégie des petits pas et des tests et en se dotant de repères clés pour faire évoluer l’objet immobilier : la data, l’observation et le dialogue avec les équipes. La réversibilité des choix devient une condition sine qua non de l’action immobilière.
4. Absorber des flux variables dans un espace invariable
Quand 57 % des décideurs interrogées disent réduire leur surface par salarié, et qu’en parallèle 48 % ressent
une augmentation du taux d’occupation depuis 1 an, un défi se pose : absorber ces flux variables dans un espace immobilier qui reste invariable. 2 stratégies apparaissent : chercher à adopter le tempo des équipes pour optimiser l’immobilier ou lisser la fréquentation sur la semaine par différents moyens.
5. Trouver l’équilibre entre optimisation et attractivité
>> Depuis 2022, 76 % des décideurs immobiliers déclarent avoir réaménagé ou être en train de réaménager les espaces de travail.
>> 67 % déclarent avoir mis en place ou sont en train de mettre en place une politique de flex-office.
>> 58 % déclarent avoir augmenté la place des espaces collectifs dans les bureaux.
Se sentir mieux que chez soi sans espace à soi est la prouesse que doivent réaliser les décideurs immobiliers qui ont pris le chemin de l’optimisation des surfaces. Plusieurs stratégies émergent : du bureau sanctuaire au bureau “as a service” pour trouver le bon équilibre et permettre à ce lieu d’être garant de grands essentiels : être un lieu de vie et de reconnexion, un lieu de représentation collective de l’entreprise, un cadre de travail, un lieu de proximité avec les clients et l’écosystème de l’entreprise.
6. L’animation de la vie collective est une priorité pour les décideurs immobiliers sur laquelle le chemin est encore long.
>> À la question “Dans quelle mesure avez-vous le sentiment que cette animation de la vie collective est une priorité pour votre entreprise ?”, ils donnent une note de 7,5/10.
>> 67 % déclarent avoir mis en place ou sont en train de mettre en place une politique de flex-office.
2e défi pour les décideurs immobiliers : réinventer la géographie du travail et le rapport au territoire
7. Proposer des lieux d’ancrage pour des travailleurs de plus en plus mobiles
Le sujet médiatisé de « l’exode urbain » et les désirs d’ailleurs révèlent sous un jour nouveau l’enjeu des stratégies immobilières des entreprises : le télétravail et les nouveaux modèles d’organisation vont-ils redessiner la géographie du travail et la relation aux territoires ?
Les entreprises y croient encore timidement : À la question, "je crois à l'avenir, pour offrir des parcours de carrière attrayants dans une logique de rétention des talents, que mon entreprise proposera des postes clés dans d'autres villes”, elles donnent une note de 6,3/10.
De la gestion de l’exception sur les mobilités géographiques au pari de renforcer certains pôles hors de l’Île-de-France ou de développer de nouvelles implantations en régions pour promouvoir de nouveaux deals entreprise-salarié, la réflexion immobilière se base sur un triptyque : opportunité de développement géographiques, logique d’attractivité des talents, prix du mètre carré.
Une conviction partagée à la majorité : le bureau, où qu’il se trouve, reste un point d’ancrage essentiel pour les collectifs pour 76 % des entreprises interrogées.
Proposer des lieux “d’être ensemble” pour des corps sociaux éclatés et aux réalités diverses
Différentes réalités de travail coexistent au sein de l’Entreprise soit parce que les collectifs sont éclatés géographiquement, soit parce que certains n’ont pas accès à la flexibilité offerte par le télétravail. Ces situations rendues visibles peuvent créer des fractures. L’enjeu est donc d’entretenir un sentiment d’appartenance commun, et de penser de nouveaux moyens pour rééquilibrer les schémas.
8. Repenser l’impact sur la cité et la société du bureau
L’immobilier de bureau est comme outil de reconnexion aux territoires et à la société. Trois phénomènes se rencontrent ici :
Les entreprises doivent, plus que jamais, devenir des acteurs de la société, à commencer par la société qui les entoure : leur ville, leur quartier, leur lieu d’ancrage. Les bureaux, incarnation territoriale des entreprises, sont appelés à jouer leur rôle d’acteurs de la ville en devenant des morceaux utiles de la ville densifiée, plutôt que des tours d’ivoire. Si aujourd’hui les décideurs immobiliers peinent à y croire, face aux défis techniques, réglementaires, sécuritaires et logistiques, ils sont les premiers à appeler de leurs vœux cette synergie avec la ville, aux côtés des salariés, des élus locaux et des riverains.